luni, 20 iunie 2011

w.g.

Fidélité Dix jours entre ce concert commémoratif à l’église Saint-Joseph (USJ) et la mort du maestro Walid Gholmieh, survenue au soir du 7 juin. Hommage des mélomanes, des chefs d’orchestre et de l’Orchestre philharmonique libanais en ces mêmes lieux, devenus un véritable temple de la culture grâce à son travail acharné et sa détermination. L’homme est parti, mais restent son souvenir, les institutions qu’il a mises sur rail et sa musique. Dans un recueillement absolu, on écoute cette musique, sa musique, son legs le plus intime...

Des fleurs blanches ornent l’autel. Au cœur de la nef centrale, un grand poster du disparu, baguette en main, surplombe public et musiciens. L’église illuminée, étouffante de chaleur, comme une étuve en cet indécis début d’été, grouille de monde.
Une atmosphère de gravité et de solennité domine, une atmosphère qui n’a rien à voir avec les concerts précédents. Au menu, un programme exclusivement consacré aux œuvres musicales de Walid Gholmieh. On aurait aimé que cela se passe de son vivant. Mais de toute façon, c’est une occasion de plus pour mieux découvrir le musicien et non seulement l’énergique chef d’orchestre et l’habile administrateur. Les notes, les mesures et les silences parlent d’un être qui s’est voué corps et âme au monde de la musique, aussi bien occidentale qu’orientale.

Aux premiers rangs, une foule d’amis, et surtout son épouse Elham, plongée dans le noir.
Un moment de silence en souvenir du maestro et l’hymne national libanais précèdent les premiers accords tumultueux du troisième mouvement de la Symphonie n 6 Al-Fajr (L’aube), opus conduit par Harout Fazlian. Deux mouvements (allegro et adagio) pour traduire les chatoyantes images sonores orientales de l’univers musical de Gholmieh. Message d’espoir et de force est cette musique aux tonalités souvent drues et vives, aux cavalcades musclées, aux rondeurs levantines, aux lenteurs d’une caravane qui a tout d’une marche accablante sous un soleil de plomb, aux jaillissements imprévisibles, au souffle boute-en-train, au dynamisme évident. Une œuvre exubérante qui pointe presque avec violence les premières lueurs. Une œuvre qui parle de joie, de couleurs, de futur, d’émergence, d’un chant interne que nul ne saurait bâillonner.
Place à la seconde symphonie (« n4 », dite « Ashahid » – Le Martyr) placée sous la houlette de Wojiech Czepiel qui en dégage, en toute émotion maîtrisée, la part de lumière, les zones d’ombre et les nuances les plus fines. Là aussi deux mouvements : les deuxième et troisième, dédiés à la contemplation, la pureté et la liberté, valeurs exceptionnelles profondément respectées par feu Gholmieh (tout en n’ignorant rien du prix à payer), lui qui avait le sens du labeur, du raffinement, de l’indépendance et de l’élévation.
Avec les premières éructations d’un basson aux gammes enrobées d’une tendresse particulière et d’une vie secrète, mais inaliénable dans sa foi triomphante, s’enclenchent les déferlements des cordes. Un flot bouillonnant, tour à tour agité ou serein, pour des cordes qui s’architecturent en volutes d’une gaze translucide et insaisissable pour une mélodie au timbre souvent véhément. Une mélodie qui aspire à la paix, à l’épanouissement, à la maîtrise de soi, à la plus transparente des harmonies.
Pour conclure, un philharmonique sans chef au pupitre pour interpréter cette brève mais sémillante Danse pour deux amants, initialement conçue pour un spectacle de Caracalla. Un orchestre sans baguette, comme pour laisser l’esprit de Gholmieh guider ce pas de deux. Deux êtres habités par leur passion, gardés par ce qui unit sans rémission, régis par les transes d’un cœur battant... Dialogue entre deux amants que ces notes entrecroisées, bondissantes, d’une sensuelle et légère « orientalité ». Avec un chapelet de sons ondoyants entre xylophone et charge de percussions dont ce subtil « daf » aux cadences ensoleillées, ces cristallines coulées de « qanoun » et cette imperceptible mais charnue plainte du « oud ».
Longue, très longue et chaleureuse ovation où public et mélomanes, les yeux rivés sur le portrait de Gholmieh suspendu dans la nef centrale, rendent un ultime hommage à une musique que brusquement, la gorge nouée par le deuil et la tristesse, ils (re)découvrent. Avec plaisir.
Moment d’intense émotion avec ces cinquante minutes de musique, un hommage de plus que cette similarité avec la brièveté des concerts de musique de chambre du mardi soir du Conservatoire national supérieur de musique à l’amphithéâtre Abou Khater (USJ) où maestro Gholmieh, malgré la multiplicité de ses tâches, sans défection aucune, était toujours présent...

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